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Entretien avec Daniel Bartement : « on est juste là pour voir si ce stade se fait dans le sens de l’intérêt général »

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Que fait-on ici aujourd’hui (le 8 décembre 2023)?

 

Ici nous sommes à l’étape d’un travail qui a pris naissance il y a à peu près 6 mois lorsqu’un collectif d’associations qui s’est formé à Lattes, à Pérols, m’a contacté afin de monter un comité scientifique pour saisir les enjeux de l’installation d’un nouveau stade à Pérols. Un des rôles de l’université c’est de redonner du savoir, notre métier est financé par l’impôt public et donc en retour on peut avoir une mission d’éclairage, alors je tiens à préciser que nous la question du stade elle nous est indifférente entre guillemets, c’est-à-dire peu nous importe qu’un stade soit fait à droite ou à gauche, pourvu que ce soit fait dans l’intérêt public. En tant que géographe je suis fort étonné qu’à Montpellier on veuille reconstruire un stade vers la plaine littorale, j’ai connu l’époque où le stade avait été inondé à Richter et ça avait donné naissance au stade de La Mosson, le stade de La Mosson qui est sur l’apex du cône de déjection de La Mosson et qui n’est pas inondable, il a été rendu inondable par l’urbanisation incroyable, la bétonnisation totale des communes de Juvignac pour l’essentiel, de Grabels et au-delà du bassin de La Mosson, donc on paie là aussi l’incurie des pouvoirs publics dans une région méditerranéenne, regardez, je sais que le collectif ceinture verte va aller visiter le futur chantier de bétonnage de la source du Verdanson, et on va achever de faire du Verdanson un Oued, alors je parle du Verdanson parce que c’est lié au stade aussi puisque vous faites un stade dans la plaine littorale qui est une plaine de comblements récents, c’est-à-dire qu’elle s’est construit avec les apports des petits fleuves côtiers et donc si vous bétonnez, vous imperméabilisez, vous provoquez de la sédimentation et de la sédimentation par très joyeuse, on a pris des photos avec les étudiants de cet espèce de mélange entre les huiles, les graisses de voiture etc et le ciment qui s’échappe, qui provoque une couche noirâtre bien dure et c’est cette couche qui en ce moment est en train de recouvrir le fond des étangs languedociens et qui stérilise les étangs, et ces étangs je vous le rappelle sont des nurseries à poissons extrêmement importantes pour toute la méditerrané occidentale, pour les loups et les daurades.

 

Que faut-il faire ?

 

Alors nous on n’a pas de conseils à donner, on est juste là pour voir si ce stade se fait dans le sens de l’intérêt général.

 

C’est le cas ?

 

Pour le moment il est un peu tôt pour trancher, moi ce qui m’étonne dans ce stade c’est que Monsieur Nicollin qui est quelqu’un… moi je ne doute pas l’attachement au football de Monsieur Nicollin et je trouve ça très bien, ça m’a l’air d’être un chef d’entreprise qui a les pieds sur terre, on n’est pas là où il est par hasard, quelqu’un qui a l’air très sympathique d’ailleurs et je pense qu’il s’est un peu laissé embarqué et puis je pense qu’il a des faux amis (…) si le sport doit être vecteur et là je dois dire que le projet de Monsieur Nicollin n’est pas neuf (…) Monsieur Nicollin se laisse entrainé à mon avis sur un modèle de stade qu’on lui vend comme innovant mais qui est vieux, alors pourquoi on lui vend ça ? Pourquoi on va le chercher à l’aide ? On va le chercher à l’aide parce qu’à Montpellier, on veut construire une « nouvelle ville » et ça ce schéma on le connait par cœur c’est le schéma de deux délirants, un hollandais et un anglais, qui s’appelle « aerotropolis » : construire une nouvelle ville avec des équipements commerciaux, ce serait la ville de demain et la vieille ville deviendrait un espèce de Disneyland pour ce qu’ils appellent les « classes créatives » (mais qui n’ont pas la culture de La Bohème au XIXème siècle) et qui sont des gens qui viennent se distraire, pour eux Monsieur Deljarry a déjà prévu un circuit culturel bouclé comme il avait prévu un circuit commercial bouclé, mais Monsieur Deljarry de toute façon a pompé tout son livre blanc sur les travaux de ces deux délirants, à propos d’aerotropolis.

 

Comment allez-vous procéder sur cette étude ?

 

L’originalité c’est qu’on a le regard de 3 nations : je travaille avec des urbanistes italiens qui enseignent à l’université de Bologne et à la Sapienza a Roma à l’école doctorale d’urbanisme et d’architecture de Rome et puis avec une université chinoise qui enseigne les arts du paysage et l’ordonnancement du territoire et donc nous travaillons en utilisant des méthodes (je viens de traduire le dernier livre d’Alberto « le principe territoire » et …Alberto qui est le fondateur de la société des territorialistes italiens, c’est né d’un constat : aujourd’hui l’espace, les territoires, sont l’enjeu d’âpres batailles un peu partout, (…) alors les méthodes se sont des méthodes  qualitatives et moi j’apprends à mes étudiants à aller enquêter avec tact, prendre leur temps, ne pas les enfermer dans des questions « âges, sexe etc » à les écouter et à leur faire dessiner ce qu’on appelle des cartes mentales, c’est-à-dire comment ils se représentent l’espace, et l’analyse de ces documents nous permet de voir quel est le degrés de conscience territoriale des habitants et de voir ce qui pourrait nourrir le refus, de saisir la parole habitante parce qu’on prêtant toujours donner la parole aux habitants avec de enquêtes d’utilité publique mais qui sont formatée etc.

 

Donc vous partez des paroles des habitants ?

 

Oui et je pense qu’il faut partir de là quand on fait de l’urbanisme, on va partir de l’analyse des cartes mentales, on fera un rapport plus détaillé mais il y a des cartes « exo centrées » c’est-à-dire que les gens se considèrent comme centrés ailleurs que sur ce quartier, « égocentrées », très centrés sur le quartier sur leur histoires familiales personnelles, et puis « a-centrées » aussi, (…) donc on est en train d’analyser le résultat de ces enquêtes, c’est 70 étudiants qui ont enquêté pendant 2 jours et puis il va y avoir l’approche par les urbanistes italiens et les urbanistes et paysagistes chinois, et on fera quelque chose fin janvier ou février en visio, avec Rome, la Chine et ici, et eux nous donneront leur sentiment au vue de ce qui existe chez eux parce que les législations ne sont pas les mêmes et le point de vue des chinois sera intéressant à voir sur ce genre de projet et sur ces conceptions de la ville à un moment où eux justement veulent désurbaniser déconcentrer et surtout partir vers la réhabilitation, parce que moi je pense que la course à la métropolisation est une idée un peu folle et j’avais monté « Montpellier 4020 » avec Guillaume Faburel, (l’auteur des métropoles barbares) il y a quelques années à Montpellier, sans partager les vues de Faburel : en chine par exemple ce qui est mis en place c’est le modèle de la cite jardin, 20 000 habitants tous les 60 kilomètres avec des petites villes autonomes avec des potagers, là avec le modèle métropolitain on aboutit à des villes qui ne sont plus des villes qui sont des terminaux de donneurs d’ordres informatiques, une architecture générique qui fait que Montpellier, de ville charmante qu’elle était il y a encore 30 ans, devient une ville d’une laideur incomparable…

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